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jours appuyée sur les genoux de Nagato. Tika à ses pieds, sanglotait.

Elle promena un regard mécontent sur ceux qui emplissaient la chambre ; d’un geste lent et pénible elle fit signe qu’on les éloignât.

Signénari les fit sortir et s’éloigna, lui-même il ne resta que le médecin et Tika.

— Tu m’as désobéi, Ivakoura, dit la mourante d’une voix qui s’affaiblissait tu as appelé du monde, pourquoi ?

— Je voulais te sauver.

— Je suis perdue… Sauvée plutôt, ajouta-t-elle, qu’aurais-je fait dans ce monde ?

Des spasmes la prirent, elle étendit les bras, le sang l’étouffait.

— De l’air ! cria-t-elle.

Tika se précipita et ouvrit toutes les fenêtres. Alors sa maîtresse la vit.

— Adieu, Tika, dit-elle, tu vois bien qu’il n’était pas vaincu, qu’il n’était pas mort ! Nous ne parlerons plus de lui.

La jeune suivante pleurait le visage dans les mains.

Fatkoura releva son regard sur le prince.

— Laisse-moi te voir, dit-elle, il y a si longtemps que mes yeux n’ont pas reflété ton visage ! comme tu es beau, mon bien-aimé ! — Vois-tu, continua-t-elle, s’adressant au médecin, c’est mon époux, il venait me tirer de captivité, mais Toza m’a outragée et je me suis jetée dans la mort.

Elle parlait d’une voix entrecoupée, sourde, de plus en plus faible. Ses yeux s’agrandissaient, une pâleur de cire envahissait son visage.

— Tu parleras de moi à ton père, Ivakoura, reprit-elle ; il m’aimait bien, lui ! Je l’avais dit que je ne