Le prince de Nagato pâlit et chercha le sabre absent de sa ceinture.
— Je ne croyais pas que ta sollicitude s’étendît ainsi jusqu’aux bêtes du royaume, dit-il avec une ironie outrageante. Je te remercie au nom de mes chevaux défunts.
Le siogoun, plein d’inquiétude, jetait des regards suppliants à Nagato. Mais il semblait que ce jour-là la patience du régent fût à toute épreuve. Il sourit et ne répondit rien.
Cependant, Fidé-Yori voyait que la colère grondait dans l’âme de son ami, et, craignant quelque nouvel éclat, il mit fin à la séance en se retirant.
Presque aussitôt un garde du palais vint prévenir le prince de Nagato que le siogoun le demandait. Le prince salua amicalement plusieurs seigneurs, s’inclina devant les autres et s’éloigna sans avoir tourné la tête du côté de Hiéyas.
Lorsqu’il arriva dans les appartements du siogoun, il entendit une voix de femme, une voix irritée et gémissante à la fois. C’était de lui que l’on parlait.
— On m’a tout rapporté, disait cette voix : ton refus d’accéder aux désirs du régent, que tu as laissé insulter sous tes yeux par le prince de Nagato, dont l’insolence est vraiment incomparable ; et la patience merveilleuse de Hiéyas, qui n’a pas relevé l’insulte par égard pour toi, par pitié pour celui que tu crois ton ami, dans ton ignorance des hommes.
Nagato reconnut que celle qui parlait était la mère du siogoun, la belle et impérieuse Yodogimi.
— Mère, dit le siogoun, occupe-toi de broderies et de parures ; c’est là le domaine des femmes.
Nagato entra vivement pour ne pas être indiscret plus longtemps.