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De différents points une fumée noire s’élevait. On en voyait aussi dans l’enceinte du daïri. On avait donc incendié le palais et la ville. La forteresse de Nisio-Nosiro, sur la rivière de l’Oie-Sauvage, était assiégée ; les cavaliers du ciel sans doute la défendaient. Le mikado devait s’être réfugié derrière ses remparts. Plus loin, de l’autre côté de la ville, une lutte était engagée entre les hommes de Yama-Kava et les soldats de Hiéyas. Ces derniers étaient à peu près maîtres de Kioto. Yama-Kava tenait encore la partie orientale de la ville ; mais sur tous les autres points flottait la bannière de Hiéyas.

Le prince de Nagato, les sourcils contractés, dévorait du regard la scène qui se déroulait à ses pieds ; il se mordait les lèvres jusqu’au sang, plein de colère, mais conservait sa lucidité d’esprit et examinait froidement la situation.

Lorsqu’un combat a lieu dans une ville, les combattants sont forcément éparpillés : le dessin des rues, leur peu de largeur, les contraignent à se diviser. La bataille se morcelle, ses mouvements n’ont plus d’unité, chaque rue, chaque carrefour à son combat spécial et isolé, ignorant les phases des luttes voisines.

Le prince de Nagato comprit tout de suite l’avantage que lui offrait cete disposition de la bataille. Sa petite troupe, nulle dans la plaine où son exiguïté aurait été à découvert, par un élan impétueux pouvait produire un heureux effet en surprenant l’ennemi par derrière, en jetant peut-être la confusion dans ses rangs.

Le prince se décida vite, il poussa un cri pour rallier ses hommes qui, à grand’peine, étaient parvenus à le rejoindre, puis il lança son cheval sur l’autre versant de la haute colline et cria :