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— Le vent va m’emporter, disait Loo qui accumulait sur lui des paquets de cordages et des chaînes, pour se rendre plus lourd.

On hissa la voile et on commença à fuir ; la barque bondissait, puis semblait s’enfoncer, elle penchait à droite ou à gauche, la voile touchait l’eau. On ne voyait plus l’horizon d’aucun côté, mais seulement une succession de collines et de vallées qui se déformaient et se reformaient, parfois une vague sautait dans le bateau et tombait avec un bruit sec, comme si on eût jeté un paquet de pierres.

Loo était abasourdi par le souffle de ce vent qui ne reprenait pas haleine et lui envoyait au visage une pluie d’écume ; il retrouvait sur ses lèvres le goût salé qui lui avait si fort déplu lorsqu’il avait failli se noyer.

— Passe-moi donc l’écope, lui dit Nata, le bateau est plein d’eau.

Loo chercha un instant.

— Je ne la trouve pas, dit Loo je n’y vois rien, le vent me fait entrer les cils dans les yeux.

Le prince ramassa lui-même l’écope et la donna au matelot.

— Sommes-nous encore loin de la terre ? demanda-t-il.

Raïden monta sur une banquette en se tenant au mât et regarda par-dessus les vagues.

— Non maître, dit-il, nous filons rapidement. Dans quelques minutes nous serons arrivés.

— Et les autres bateaux, dit Loo, on ne les voit plus.

— Je les vois, moi, dit Raïden. Quelques-uns sont tout proches de la terre, d’autres en sont plus éloignés que nous.

— Où allons-nous aborder ? demanda le prince, sur