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se remit à marcher rapidement, au hazard, s’égarant.

Tout à coup elle se trouva à quelques pas du palais habité par le prince de Toza ; des gens allaient et venaient, elle entendait un bruit de voix : elle s’approcha encore et s’agenouilla derrière un buisson.

Elle prêta l’oreille.

Elle surprit quelques mots et comprit que l’on félicitait le prince sur la capture qu’il venait de faire. Les inférieurs s’exprimant à demi voix, respectueusement, Fatkoura entendait mal, mais le prince de Toza prit la parole, à voix haute, et alors elle n’entendit que trop.

— Je vous remercie, dit-il, de prendre part à la joie que me cause l’événement dont il s’agit ; Nagato est l’ennemi le plus acharné de notre grand Hiéyas, c’est donc une gloire pour moi de le délivrer de cet adversaire détesté : je l’ai condamné au dernier supplice, il sera exécuté demain, au milieu du jour, dans l’enceinte de la forteresse, et l’on portera de ma part sa tête à Hiéyas.

Fatkoura eut la force de ne pas crier. Elle alla rejoindre Tika, elle en savait assez. Sa pâleur était effrayante, mais elle était calme, elle écrasait le sabre contre sa chair, il lui faisait mal, mais la tranquillisait.

— Je t’en conjure, rentre, maîtresse, dit Tika ; si l’on te surprenait, on se défierait de nous et on nous enfermerait.

— Tu as raison, dit Fatkoura, mais il faut absolument que je sache dans quelle partie du palais on a conduit Nagato. Ils veulent me le tuer, ils le condamnent à une mort ignominieuse. Si je ne puis le sauver, je lui porterai du moins de quoi mourir noblement.

— Moi je puis passer inaperçue, dit Tika, je puis