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chevelure embrouillée ; il était nu, moins un langouti d’étoffe rouge, et ruisselait de pluie.

— Le fakir ! murmura Naïk en joignant les mains avec un éclair d’espoir dans les yeux.

— Oui, c’est moi ; vous m’embrasserez plus tard, dit Sata-Nanda en laissant glisser à terre un sac en peau de crocodile qu’il portait sur le dos.

Il se hâta d’ouvrir ce sac et en tira plusieurs flacons et une grande quantité de larges feuilles rugueuses et velues fraîchement cueillies. Alors il s’approcha du malade, attacha sur lui, longuement, un regard fixe et lui passa à plusieurs reprises les doigts sur le front, sur les yeux et sur la poitrine.

— C’est un dieu, disait Arslan ; s’il est venu, il le sauvera.

— Demain, il était trop tard, dit le fakir.

Il arracha le peignoir de soie qui enveloppait Bussy, et, sans égards pour la finesse et la blancheur de sa peau, il se mit à la frictionner rudement, avec une poignée des feuilles qu’il avait apportées.

— Tu n’ignores pas, lui dit le médecin, que cette plante contient un poison violent.

— Si je l’ignorais, je ne m’en servirais pas. D’ailleurs, qu’importe, puisque tu juges ton malade mort.

— Quel est ce fou ? demanda tout bas le médecin à Naïk.

— C’est un saint homme qui connaît tous les secrets de la nature. Il a été enterré pendant six mois.

Le médecin du roi haussa les épaules et jeta un regard dédaigneux au fakir, qui se démenait comme