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le portail de l’entrée ; mais Bussy n’était plus pressé maintenant, et autant ses yeux avaient été jusque-là aveuglés d’indifférence, autant ils étaient avides de tout voir.

La porte, haute et majestueuse, s’ouvrait dans une muraille tapissée de jasmins ; deux colonnes de porphyre soutenaient un arceau d’ivoire sculpté, au sommet duquel flottaient des étendards couleur de safran, à longues franges, et, dans des vases de cristal, sur les chapiteaux, deux jeunes manguiers s’élevaient.

Les pages maintenaient le cheval au pas, et le firent entrer dans la première cour.

Elle était environnée d’édifices d’une blancheur éblouissante, avec des toits en terrasses, des balcons sculptés, des escaliers de marbre. Sous les arbres, plantés régulièrement, des guerriers s’exerçaient au maniement des armes. Dans un coin, le portier sommeillait sur un large fauteuil de pierre.

Une baie carrée, plus large à la base qu’au sommet, donnait accès dans la seconde cour, que bordaient les écuries et les étables. Des variétés d’herbes succulentes étaient amoncelées devant les chevaux, aux belles crinières tressées, qui l’éparpillaient d’une lèvre repue, sur la mosaïque luisante du sol. Les mahouts offraient aux éléphants, sur des plateaux en filigrane d’argent, des boulettes de riz et de beurre liquéfié ; on dorait les cornes des buffles et des zébus de trait, on frottait d’huile le cou des béliers de combat. Plus loin des femmes peignaient et parfumaient les crins des montures favorites. Enchaîné à