Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/206

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cessible, dominée par une forteresse. Le front qui longeait le ruisseau était bordé de tranchées et d’épaulements, garnis d’une artillerie nombreuse ; le retranchement était très fort, en effet, et difficile à enlever.

D’Auteuil décida qu’il fallait se reposer, ce jour-là et une partie de la nuit, pour attaquer le lendemain à l’aube.

On se mit en marche, le lendemain, un peu après minuit, les Français au poste d’honneur, à l’avant-garde, et suivis de l’armée des deux princes. Mais lorsqu’ils furent en présence de l’ennemi, le comte d’Auteuil offrit d’emporter seul, avec les troupes de Pondichéry, le retranchement derrière lequel s’abritait l’usurpateur. Chanda-Saïb accepta, tandis que le roi haussait les épaules, jugeant ses nouveaux alliés parfaitement fous.

Les fifres sonnèrent, les tambours battirent, et l’on vit frissonner les étendards français, où apparaissait une figure entourée de rayons d’or, au-dessous de la devise du roi-soleil : Nec pluribus impar.

Au pas de course, les Français s’élancèrent à l’assaut. Une grêle de boulets, crachés par des pièces très bien pointées, les repoussèrent ; mais ils se rallièrent aussitôt, et le comte d’Auteuil, l’épée à la main, s’élança le premier en s’écriant :

— Qui m’aime, me suive !

Cette fois ils s’acharnèrent, malgré le feu toujours très vif. La seconde attaque dura plus d’une demi-heure, et allait réussir, lorsque le comte d’Auteuil tomba, blessé à la cuisse par une balle. Ses hommes reculèrent encore.