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Déjà les soldats musulmans se débandent, beaucoup se mettent à courir pour arriver plus tôt.

— Qu’est-ce qui leur prend ? s’écria Kerjean.

Ce n’est qu’en arrivant dans la vallée, large et charmante, avec une rivière coulant au fond, qu’on a l’explication de cette course. Beaucoup sont au bord de l’eau, défaisant leurs vêtements, il s’agit des ablutions pieuses, déjà un peu en retard, car le soleil est levé.

— Ma foi, je veux voir cela de près, dit Bussy, descendant de l’éléphant, pour courir, lui aussi, vers la rivière.

Un umara, faisant office de muezzin, chantait à tue-tête, sur la mélopée prescrite :

— Dieu très grand ! Dieu très grand ! Dieu très grand ! J’atteste qu’il n’y a pas de Dieu sinon Dieu, et que Mahomet est le prophète de Dieu. À la prière de l’aube ! à la prière ! Il n’y pas de Dieu sinon Dieu !

Et, à toutes jambes, les fidèles dévalaient vers la rivière, se déshabillant tout en courant. On s’orientait pour se tourner vers la Mecque.

Bussy s’était approché : l’umara était à genoux penché vers l’eau et se lavait les mains, en récitant la première prière :

— Qu’Allah soit loué, il a créé l’eau limpide, et lui a donné la vertu de purifier. Il a aussi rendu notre foi pure et sincère.

Il prit ensuite de l’eau dans sa main gauche, en but une gorgée et se lava deux fois la bouche :

— Je t’en supplie. Seigneur, abreuve-moi de cette