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— L’épouse de Chanda-Saïb est ici et demande à me voir, dit-elle ; il faut quelque chose de grave pour qu’elle se décide à sortir à une pareille heure de son palais. Je l’ai fait conduire dans le salon blanc. Viens m’y trouver bientôt.

Le salon blanc était une petite pièce, tendue de damas blanc et argent, où Mme Dupleix se reposait quelquefois pendant les réceptions, et où les invités n’entraient pas sans être appelés. Le gouverneur s’y rendit, emmenant Bussy avec lui. On fit retomber derrière eux une portière, et le page garda l’entrée.

Aly-Résa était là, près de sa mère, dont on ne voyait que les grands yeux noirs entre ses voiles de mousseline, assise à côté de la bégum, qui lisait une longue lettre. La musulmane se leva pour saluer le gouverneur.

— Je viens en suppliante, dit-elle à Dupleix, mon époux n’a d’espoir qu’en toi et est toujours ton plus fidèle esclave.

Bussy, rapidement, traduisit la phrase.

— Voici, dit la bégum, qui refermait le rouleau de parchemin : Chanda-Saïb, qui avait été pris par les Mahrattes, est libre aujourd’hui. L’héritier légitime du roi qui vient de mourir s’est porté garant de la rançon, et les Mahrattes fournissent trois mille cavaliers à leur ancien prisonnier, qui, à leur tête, va rejoindre le Soubab dépossédé, pour faire alliance avec lui et l’aider à conquérir son trône.

— Voilà qui est très bien, dit Dupleix, la similitude de leur destinée devait rapprocher ces deux hommes.

— Leur plan est celui-ci, continua Jeanne : atta-