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Au déluge, je fis presque chavirer l’arche,
Et quand j’y mis le pied, l’eau monta jusqu’au pont.

Je porte, en me jouant, des tours sur mon épaule ;
Les murs tombent broyés sous mon flanc qui les frôle
Comme sous un bélier.
Quel est le bataillon que d’un choc je ne rompe ?
J’enlève cavaliers et chevaux dans ma trompe,
Et je les jette en l’air sans plus m’en soucier !

Les piques, sous mes pieds, se couchent comme l’herbe
Je jette à chaque pas, sur la terre, une gerbe
De blessés et de morts.
Au cœur de la bataille, aux lieux où la mêlée
Rugit plus furieuse et plus échevelée,
Comme un mortier sanglant, je vais gâchant les corps.

Les flèches font sur moi le pétillement grêle,
Que par un jour d’hiver font les grains de la grêle
Sur les tuiles d’un toit.