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Derrière nous le sol se crevasse et s’effondre.
Nul ne peut retourner. Comme un maigre troupeau
Que l’on mène au boucher, ne pouvant plus le tondre,
La vieille Mob nous pousse à grand train au tombeau.

Certe, en mes jeunes ans, plus d’un bal doit éclore,
Plein d’or et de flambeaux, de parfums et de bruit,
Et mon cœur effeuillé peut refleurir encore ;
Mais ce ne sera pas mon bal de l’autre nuit.

Car j’étais avec toi. Tous deux seuls dans la foule,
Nous faisant dans notre âme une chaste Oasis,
Et, comme deux enfants au bord d’une eau qui coule,
Voyant onder le bal, l’un contre l’autre assis.

Je ne pouvais savoir, sous le satin du masque,
De quelle passion ta figure vivait,
Et ma pensée, au vol amoureux et fantasque,
Réalisait, en toi, tout ce qu’elle rêvait.