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NOTES ET VARIANTES, VERS 194

racontent : 1° La Karlamagnus Saga (xiiie s., 1re branche, 36) ; 2° le roman de Tristan de Nanteuil (xive s.) ; 3° la version en prose de Berte aus grans piés (xve s.) ; 4° la « Chronique de Weihenstephan » (l’original est du xive s., le ms. du xve). ═ D’autres documents ne parlent plus vaguement que d’un « péché très-grave commis par l’Empereur, et qu’il aurait omis à dessein dans sa confession à saint Gilles ». Un parchemin miraculeux descendit du ciel, et Gilles y vit écrit le péché de Charles. Celui-ci fut forcé d’avouer sa faute, et... maria sa sœur avec Milon d’Angers. Roland naquit sept ans après. Ainsi s’expriment : 1° la « Légende latine de saint Gilles ». (Acta sanctorum Septembris, I, 302-303 ; mais elle ne peut, en réalité, s’appliquer qu’à Charles Martel.) 2° Adam de Saint-Victor (xiie s., Prose : Promat pia vox cantoris) ; et les deux proses : Quantum decet et Sicut passer. (Mone, Hymni latini medii œvi, III, 265-167.) 3° L’office de Charlemagne composé en 1165. 4° La Kaisercronik (xiie s.). 5° Le Ruolandes Liet du curé Conrad (milieu du xiie s.). 6° Le roman de Huon de Bordeaux (fin du xiie s., aux vers 10,217 et ss.). 7° Le Carolinus de Gilles de Paris, poëme composé pour l’éducation du jeune Louis, fils de Philippe-Auguste. 8° La Chronique de Philippe Mouskes. 9° La Légende dorée. ═ Par bonheur, d’autres textes font naître Roland d’une mère moins illégitime. Ce sont : 1° La Chanson de Roland (qui ne contient du moins aucune allusion à la naissance adultérine de notre héros). 2° Le Charlemagne de Venise (xiie s. ; analysé par M. Guessard, Bibl. de l’École des Chartes, XVIII, 402), qui en fait seulement un bâtard.... La sœur de Charles (Berte) s’éprend ici d’un sénéchal nommé Milon, et, persécutée par son frère, accouche de Roland au milieu d’un bois, près d’Imola. (V. aussi l’Innamoramento di Milone d’Anglante e di Berta. Milan, 1529.) 3° Le roman des quatre fils Aymon (xiiie s.) et 4° le Charlemagne de Girart d’Amiens (commencement du xive s.) croient à la naissance très-légitime et très-pure de Roland. ═ Telles sont les trois grandes traditions, les trois grands courants de l’opinion ou plutôt de la légende que nous avons pu constater dans les documents du moyen âge. (V. nos Épopées françaises, II, 57-60.) ═ Sur les premières années de Roland, nous n’avons d’autre témoignage légendaire que le Charlemagne de Venise.... Le bâtard de Berte et du sénéchal Milon grandit dans la misère et l’abandon. Un jour, l’enfant rencontre la grande armée de Charlemagne qui revient de délivrer Rome. Roland se précipite dans le palais de Sutri qu’habite l’Empereur ; il y est accueilli, et réjouit bientôt toute la cour par son appétit et son esprit. Naimes, le sage conseiller, soupçonne que le petit bachelier doit être de bonne race ; on suit l’enfant et l’on découvre la pauvre Berte avec Milon. Charles veut les frapper ; mais Roland ne craint pas