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NOTES ET VARIANTES

jeune adversaire. L’Empereur s’était caché sous les habits d’un pèlerin ; mais il est reconnu par Gaydon, et forcé d’accepter toutes les conditions que son vassal veut lui imposer. Le champion de Roland est alors nommé grand sénéchal de France ; mais, un an après, il se fait ermite. (V. 9678-10878.) ═ Un autre continuateur de Roland, c’est Anseïs de Carthage, qui a également donné son nom à un de nos Romans... Avant de quitter l’Espagne pacifiée, Charlemagne veut lui donner un roi : il choisit Anseïs, le fils de Rispeu de Bretagne. (Anseïs de Carthage, poëme composé vers le milieu du xiiie s., B. N., 793, f° 1) Anseïs étant trop jeune, on lui donne le vieil Isoré pour tuteur. (Ibid., f° 1, 2.) Par malheur, cet Isoré a une fille qui s’éprend du jeune roi d’Espagne, et se fait déshonorer par lui. De là une implacable colère d’Isoré contre Anseïs. Le père indigné va jusqu’à s’allier aux païens pour mieux lutter contre le jeune roi chrétien. (Ibid., f° 2-14.) La guerre s’engage, et elle est véritablement interminable. (Ibid., f° 14-52.) Anseïs, en détresse, demande à grands cris le secours de Charlemagne. Malgré ses deux cents ans, Charlemagne accourt et le délivre. (Ibid., f° 52-71.) Le traître Isoré est pendu, et Marsile, dont l’auteur d’Anseïs n’a pas craint de prolonger la vie, est enfin mis à mort sur l’ordre du roi de France pour avoir obstinément refusé le baptême. Quant à Anseïs, il règne désormais sans conteste dans l’Espagne soumise et apaisée. (F° 68-72.) ═ Ici s’achève, dans notre légende, ce que les Italiens ont appelé la Spagna, et des Pyrénées nous sommes transportés sur les bords du Rhin. ═ Dans la Chanson des Saisnes, Charlemagne ne joue qu’un rôle assez effacé, et surtout assez vil... Guiteclin (Witikind) vient d’entrer vainqueur dans Cologne ; les Saisnes menacent l’empire chrétien. L’Empereur apprend ces tristes nouvelles, et en pleure. (Chanson des Saisnes, des dernières années du xiie s., Couplets v-xii.) Donc la guerre commence ; mais tout semble conspirer contre Charles : la discorde éclate parmi ses peuples. Les Hérupois (c’est-à-dire les Normands, les Angevins, les Manceaux, les Bretons et les Tourangeaux) jouissent de certains priviléges que les autres sujets de l’Empereur leur envient. De là une sorte de révolte qu’il ne sera pas aisé de calmer. Charles voudrait contenter tout le monde, et enlever néanmoins leurs priviléges aux Hérupois ; mais ceux-ci montrent les dents, et arrivent menaçants jusque dans Aix. Ils parlent haut, et l’Empereur pousse la bassesse jusqu’à marcher pieds nus à leur rencontre. Tout s’arrange. (Couplets xiii-xlvii.) C’est alors, mais alors seulement que Charles peut entrer en campagne contre les Saisnes. Et c’est ici qu’apparaît un frère de Roland, Baudouin, qui se prend d’un amour ardent pour la femme de Guiteclin, Sibille, et pour elle s’expose mille fois à la mort. La guerre se prolonge pendant plus de deux ans. Les Hérupois daignent enfin consentir à venir au