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NOTES ET VARIANTES, VERS 994

et dont on mettait parfois double épaisseur. Sur ce bois on clouait du cuir : Tranchent les quirs e ces fuz qui sunt dubles. — Cheent li clou... (Vers 3583, 3584.) Le cuir de l’écu semble avoir porté le nom de pene : De sun escut li freint la pene halte. (V. 3425 et aussi 1298.) Le champ de l’écu était « peint à fleurs » (vers 1810, etc.), c’est-à-dire qu’on y peignait des dessins d’enroulement romans. D’autres fois, il était revêtu seulement de couleurs vives : L’escut vermeil li freint. (Vers 1576.) Tut li trenchat le vermeill e l’azur (vers 1557) ;

le vermeil e le blanc. (Vers 1299.) On va jusqu’à le dorer, du moins en partie : L’escut li freint ki est ad or e à flurs. (Vers 1354.) Enfin, l’écu merveilleux du païen Abisme est charge de pierres, d’améthystes, de topazes, etc. (Vers 1660 et suivants.) ═ Au centre de l’écu est la boucle (V. les fig. 8 et 9), et c’est à cause de la boucle que l’on dit : escut bucler (vers 1283), et que plus tard on dira un « bouclier » tout court. La boucle (umbo) est une proéminence au centre de l’écu. Cette proéminence est assez large : Cez bucles lées. (Vers 3570.) La boucle est dorée (vers 1283) ou d’or : D’or est la bucle e de cristal listet. (Vers 3149.) La bucle d’or mer. (Vers 1314.) D’autres fois elle est en pierres précieuses : Tute li freint la bucle de cristal. (Vers 1263.) ═ La Chanson de Roland ne parle pas d’armoiries sur l’écu ; mais il est un vers très-précieux qui prouve que déjà l’on se servait de certains signes de ralliement peints sur le bouclier : Escuz unt genz de multes cunoisances. (Vers 3090.) Il ne faudrait pas, d’ailleurs, tirer d’autres conclusions de ce vers. S’il est question quelque part d’escuz de quarters (vers 3867), il ne s’agit que des divisions naturelles de l’écu, de ces divisions que produisaient les bandes de fer destinées à soutenir le cuir sur le fût. ═ Le chevalier passait son bras dans les anses de l’écu, et, pendant le combat, il le tenait serré contre son cœur. Mais, durant la marche, les chevaliers, embarrassés de cet énorme écu, de ce grant escut let (vers 3148), le pendaient à leur cou : Pent à sun col un escut de Biterne. (Vers 2991. V. aussi 713, 1292, etc.) En lur cols pendent lur escuz de quarters. (Vers 3867.) La bande d’étoffe ou de cuir qui servait à suspendre le bouclier (V. la fig. 5) s’appelait la guige : Pent à sun col un soen grant escut let. — La guige est d’un bon palie roet. (Vers 3148, 3150.) ═ Targes, employé une fois dans notre chanson (Targes roées, vers 3569), nous paraît ici le synonyme d’escuz. ═ Quelques mots sur les éperons. Ils se placent sur la chaussure ordinaire : Esperuns d’or