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LA CHANSON DE ROLAND

« Quelle que soit la faute dont Roland se soit rendu coupable envers Ganelon,
« Votre intérêt eût dû lui servir de défense.
« Ganelon est un félon, Ganelon a trahi votre neveu ;
« Devant vous il vient de se mettre en mauvais cas, de se parjurer.
« Pour tout cela je le condamne à mort. Qu’on le pende,
« Et puis, qu’on jette son corps aux chiens :
« C’est le châtiment des traîtres.
« Que s’il a un parent qui me veuille donner un démenti,
« Avec cette épée que j’ai là, à mon côté,
« Je suis tout prêt à soutenir mon avis.
« — Bien parlé, » disent les Francs.


CCLXXXIV


Alors devant le Roi s’avance Pinabel.
Il est grand, il est fort, il est rapide et brave ;
Mort est celui qu’il frappe d’un seul coup.
« Sire, dit-il au Roi, c’est ici votre plaid :
« Ordonnez donc qu’on ne fasse point tout ce bruit.
« Voici Thierry qui vient de prononcer son jugement :
« Eh bien ! je lui donne un démenti, et me veux battre avec lui. »
Et il lui met au poing droit le gant en cuir de cerf :
« Bien, dit l’Empereur, mais je veux de bons otages. »
Trente parents de Pinabel consentent à servir légalement de caution.
« Je vous donnerai caution, moi aussi, » dit le Roi ;
Et il les fait garder jusqu’à ce que justice se fasse.


CCLXXXV


Thierry, quand il voit que la bataille est proche,
Présente à Charles son gant droit.
Et l’Empereur donne caution pour lui, et fournit des otages.