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LA CHANSON DE ROLAND

Lui partage les côtes,
Et l’abat mort de son cheval rapide.
L’Émir ensuite tue Gebouin, Laurent,
Et le vieux Richard, sire des Normands.
« La brave épée que Précieuse ! s’écrient alors les païens ;
« Nous avons là un puissant défenseur : frappez, barons, frappez. »


CCLVII


Il fait beau voir les chevaliers païens,
Ceux d’Occiant, ceux d’Argoilles et de Bascle,
Frapper dans la mêlée de beaux coups de lance ;
Mais les Français n’ont pas envie de leur céder le champ.
Il en meurt beaucoup des uns et des autres,
Et jusqu’au soir la bataille est très-rude.
Les barons de France firent là de grandes pertes.
Que de douleurs encore avant la fin de la journée !


CCLVIII


Français et Arabes frappent à qui mieux mieux ;
Le bois et l’acier fourbi des lances sont mis en pièces.
Ah ! celui qui eût vu tant d’écus en cet état,
Celui qui eût entendu le bruit de ces blancs hauberts que l’on heurte,
Et de ces heaumes qui grincent contre les boucliers ;
Celui qui eût alors vu tomber tous ces chevaliers,
Et les hommes pousser des hurlements de douleur et mourir à terre,
Celui-là saurait ce que c’est qu’une grande douleur !
La bataille est rude à supporter,
Et l’Émir invoque Apollon,
Tervagan et Mahomet :
« Je vous ai bien servis, seigneurs mes dieux !