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LA CHANSON DE ROLAND

Tous alors jouent de la lance
Et frappent sans retard de l’épée :
La bataille est pleine de merveilleuse angoisse...


CCLII


Malprime, le baron, chevauchait au milieu de la mêlée
Et y avait fait un grand massacre de Français ;
Mais voici le duc Naimes qui lui lance un regard terrible
Et d’un très-vigoureux coup va le frapper.
Il lui brise le haut de son écu,
Lui enlève l’orfroi qui ornait les deux pans de son haubert,
Et lui enfonce dans le corps tout un gonfanon de couleur jaune...
Entre sept cents autres il l’abat roide mort.


CCLIII


Le roi Canabeu, le frère de l’Émir,
Pique alors son cheval des éperons,
Tire son épée au pommeau de cristal,
Et en frappe Naimes sur le heaume princier :
Il en fracasse la moitié,
Et, de son tranchant d’acier, coupe cinq des lacs qui le retenaient.
Le capuchon de mailles ne saurait préserver le duc,
La coiffe est tranchée jusqu’à la chair,
Et un lambeau en tombe à terre.
Le coup fut rude, et Naimes en fut abasourdi comme par la foudre :
Il fût tombé sans l’aide de Dieu...
Il est là, la tête sur la crinière de son cheval :
Si le païen frappe un second coup,
C’en est fait du noble vassal, il est mort !
Mais Charles de France arrive à son secours.