Page:Gautier - La Chanson de Roland - 1.djvu/473

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
249
LA CHANSON DE ROLAND

« C’est toi qui as préservé les trois enfants dans le feu ardent.
« Eh bien ! que ton amour sur moi veille aujourd’hui,
« Et, dans ta bonté, s’il te plaît, accorde-moi
« De pouvoir venger mon neveu Roland ! »


CCXXX


Charles a fini sa prière ; il se relève,
Fait sur son front le signe qui a tant de puissance,
Puis monte sur son cheval courant :
Naimes et Jozeran lui tiennent l’étrier.
Il saisit sa lance acérée, son écu.
Son corps est beau, gaillard et avenant ;
Son visage est clair, et belle est sa contenance.
Très-ferme sur son cheval, il s’avance.
Et les clairons de sonner par devant, par derrière ;
Le son de l’olifant domine tous les autres.
Les Français se souviennent de Roland et pleurent.


CCXXXI


L’Empereur chevauche bellement ;
Sur sa cuirasse il a étalé toute sa barbe,
Et, par amour pour lui, tous ses chevaliers font de même.
C’est le signe auquel on reconnaît les cent mille Français.
Ils passent ces montagnes, ils passent ces hautes roches,
Ils traversent ces profondes vallées, ces défilés horribles.
Ils sortent enfin de ces passages, et les voilà hors de ce désert,
Les voilà dans la Marche d’Espagne.
Ils y font halte au milieu d’une plaine...
Cependant Baligant voit revenir ses éclaireurs,
Et un Syrien lui rend ainsi compte de son message :