Le roi Charles s’arrache la barbe
Au souvenir de sa douleur et du grand désastre ;
Puis sur toute son armée il jette un regard fier,
Et, d’une voix très-haute et très-forte, s’écrie :
« À cheval, barons français, à cheval et aux armes ! »
L’Empereur est le premier à s’armer ;
Vite il endosse son haubert,
Lace son heaume et ceint Joyeuse, son épée,
Dont la clarté lutte avec celle du soleil.
Puis à son cou il suspend un écu de Gironne.
Saisit sa lance qui fut faite à Blandonne,
Et monte sur son bon cheval Tencendur,
Qu’il a conquis aux gués sous Marsonne,
Lorsqu’il fit tomber roide mort Malpalin de Narbonne.
Charles lui lâche les rênes, et l’éperonne vivement :
Devant cent mille hommes il fait un temps de galop,
Réclamant Dieu et l’Apôtre de Rome.
Dans toute la vallée les Français sont descendus de cheval,
Et plus de cent mille hommes s’arment ensemble.
Comme leur équipement leur sied bien !
Leurs chevaux sont rapides, leurs armes belles ;
Leurs gonfanons pendent jusque sur leurs heaumes.
S’ils trouvent l’armée païenne, certes ils lui livreront bataille.
Les voilà qui montent en selle, avec quelle habileté !