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LA CHANSON DE ROLAND


CLXIV


Roland s’en retourne fouiller la plaine :
Il y a trouvé le corps de son compagnon Olivier,
Le tient étroitement serré contre son cœur,
Et, comme il peut, revient vers l’Archevêque.
Sur un écu, près des autres Pairs, il couche son ami.
Et l’Archevêque les a tous bénis et absous.
La douleur alors et les larmes de redoubler :
« Bel Olivier, mon compagnon, dit Roland,
« Vous fûtes fils au vaillant duc Renier
« Qui tenait la marche de Gênes-sur-Mer.
« Pour briser une lance, pour mettre en pièces un écu,
« Pour rompre et démailler un haubert,
« Pour conseiller loyalement les bons,
« Pour venir à bout des traîtres et des lâches,
« Jamais, en nulle terre, il n’y eut meilleur chevalier ! »


CLXV


Le comte Roland, quand il voit morts tous ses pairs
Et Olivier, celui qu’il aimait tant,
Il en a de la tendreur dans l’âme ; il se met à pleurer ;
Tout son visage en est décoloré.
Sa douleur est si forte qu’il ne peut se soutenir ;
Bon gré, mal gré, il tombe en pâmoison ;
Et l’Archevêque : « Quel malheur, dit-il, pour un tel baron ! »


CLXVI


L’Archevêque, quand il vit Roland se pâmer,
En ressentit une telle douleur, qu’il n’en eut jamais de si grande.