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LA CHANSON DE ROLAND

« Nous tiendrons pied fortement sur la place :
« De nous viendront les coups, et de nous la bataille ! »


LXXXVIII


Quand Roland voit qu’il y aura bataille,
Il se fait plus fier que lion ou léopard.
Il interpelle les Français, puis Olivier :
« Ne parlez plus ainsi, ami et compagnon ;
« L’Empereur, qui nous laissa ses Français,
« A mis à part ces vingt mille que voici.
« Pas un lâche parmi eux : Charles le sait bien.
« Pour son seigneur on doit souffrir grand mal,
« Endurer le froid et le chaud,
« Perdre de son sang et de sa chair.
« Frappe de ta lance, Olivier, et moi, de Durendal,
« Ma bonne épée que me donna le Roi.
« Et si je meurs, qui l’aura pourra dire :
« C’était l’épée d’un brave ! »


LXXXIX


D’autre part est l’archevêque Turpin ;
Il pique son cheval et monte sur une colline,
Puis s’adresse aux Français, et leur fait ce sermon :
« Seigneurs barons, Charles nous a laissés ici ;
« C’est notre roi : notre devoir est de mourir pour lui.
« Chrétienté est en péril, maintenez-la.
« Il est certain que vous aurez bataille,
« Car, sous vos yeux, voici les Sarrasins.
« Or donc, battez votre coulpe, et demandez à Dieu merci.
« Pour guérir vos âmes, je vais vous absoudre ;
« Si vous mourrez, vous serez tous martyrs :