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LA CHANSON DE ROLAND

« Il vous suivra au royaume de France
« Et recevra votre loi.
« Il deviendra, mains jointes, votre vassal
« Et tiendra de vous le royaume d’Espagne.
« — Grâces en soient rendues à Dieu, s’écrie le Roi.
« C’est à vous que je le dois, Ganelon : vous en serez bien récompensé. »
On fait alors sonner mille clairons dans l’armée :
Les Francs lèvent le camp, chargent leurs sommiers,
Et tous s’acheminent vers France la douce…


L’ARRIÈRE-GARDE ; ROLAND CONDAMNÉ À MORT


LV


Charles le Grand a dévasté l’Espagne,
Pris les châteaux, violé les cités.
« Ma guerre est finie, » dit le Roi ;
Et voilà qu’il chevauche vers douce France.
Le comte Roland a planté son enseigne
Sur le sommet de la colline, droit contre le ciel ;
Par tout le pays, les Francs prennent leur campement…
Et, pendant ce temps, l’armée païenne chevauche par les grandes vallées,
Hauberts et broignes au dos,
Heaumes en tête, épées au côté,
Écus au cou et lances debout.
Au haut de ces montagnes il est un bois. Ils y font halte.
C’est là que quatre cent mille hommes attendent le lever du jour.
Et les Français qui ne le savent pas ! Dieu, quelle douleur !