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INTRODUCTION

ou plutôt pénétra jusque dans les livres élémentaires et « à l’usage des gens du monde ». Pendant que P. Paris, dans le tome xxii de l’Histoire littéraire[1], analysait scientifiquement toutes nos Chansons de geste, un universitaire (qui l’eût espéré ? qui le croirait ?) citait, dans une Histoire de la Littérature française, de longs fragments de notre Roland qu’il ne craignait pas d’admirer très-haut[2]. M. Littré écrivait, deux ans après, son article sur la Poésie épique dans la société féodale[3], et M. Charles Nisard, dans son Histoire des livres populaires[4], étudiait pittoresquement les dernières transformations de la légende de Roland, les Conquestes du grant Charlemagne et Galien le restauré. Collin de Plancy mettait à la portée des enfants la fable de Berte aux grands pieds et quelques autres traditions carlovingiennes[5] : avec un peu plus de travail, il fût devenu notre Simrock. Vers le même temps, Henri Martin, dans la quatrième édition de son Histoire de France, accusait de féodalisme tous les poëmes de notre cycle, et ne consentait à faire d’exception que pour l’auteur du Roland : « Ce fut là, disait-il, le seul chantre de la France[6]. » En l’année 1855-1856, M. Paulin Paris, avant de monter dans sa chaire du Collége de France, distribuait à ses auditeurs un fascicule où étaient imprimés quelque cents vers du Roncevaux de Paris ; il les expliqua très-intelligemment, et ce fut tout le sujet de son cours. Cependant M. Geoffroy était revenu de son voyage dans les bibliothèques de Danemark, de Suède et de Norwége ; il en rapportait une belle liste de Sagas consacrées à nos héros français, et qui étaient de vraies traductions de nos poëmes[7]. L’Allemagne, qu’on accuse

  1. En 1852.
  2. Demogeot, éditions de 1852 et 1857.
  3. Revue des Deux Mondes, 1er juillet 1854. ═ Cet article a été réimprimé dans l’Histoire de la langue française, t. I, p. 256.
  4. Paris, Amyot, 1854, 2 vol. in-8o.
  5. J’ai sous les yeux la 7e édition, qui est sortie des presses de la Société de Saint-Victor.
  6. La première-seconde édition avait été commencée en 1833 et fut achevée en 1836. La troisième fut mise sous presse en 1837, et ne fut terminée qu’en 1534. La quatrième fut exécutée entre les années 1855-1860.
  7. Notices et extraits de manuscrits concernant l’histoire et la littérature