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HISTOIRE D’UN POËME NATIONAL

couplets qui nous semblaient omis. C’est le manuscrit de Paris qui nous a été le plus précieux, et, ensuite, celui de Versailles. Mais il n’est pas impossible de tirer aussi quelques bonnes variantes des manuscrits de Lyon et de Venise. Aucun n’est à négliger[1].

Quelques fragments d’une belle statue avaient été jetés çà et là : nous avons voulu les recueillir et avons essayé de refaire la statue aussi complète, aussi belle, aussi radieuse que dans sa splendeur première. Y aurons-nous réussi ?


XIII. — d’un troisième outrage subi par le roland
— les romans en prose


Il faut se défier des hommes et des siècles qui n’aiment pas la poésie et lui préfèrent la prose. Sans beaux vers, pas de grande époque littéraire. Les XIVe et XVe siècles, qui n’ont pas aimé nos vieux poëmes et se sont passionnés pour les romans en prose, sont, à tous égards, des siècles de décadence.

C’est depuis l’avénement des Valois que cette décadence a commencé ; mais elle est surtout la marque du XVe siècle. L’extrême médiocrité des remaniements que subirent le Roland et toutes nos autres Chansons a singulièrement contribué à l’engouement universel pour les rédactions en prose. Il faut d’ailleurs bien se persuader que nos premiers romans en prose ont été, en général, calqués sur nos derniers romans en vers dont ils reproduisent servilement toutes les péripéties, toute l’action et les insupportables longueurs. La plupart de ces mêmes Romans en prose seront un jour reproduits par l’imprimerie, sans autre modification importante que celle de leur langue. Puis, ils entreront dans la Bibliothèque bleue

  1. Dans notre note 1 de la p. xlv, nous avons donné la liste exacte de tous nos remaniements.