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ruelle qui s’ouvrira sur la plage, pensait Omiti.

Elle atteignit une sorte de carrefour ouvert du côté de la mer, bordé de l’autre côté d’un demi-cercle de huttes misérables qu’elle apercevait confusément sous leurs capuchons de neige. Au centre, accrochée à un poteau, une lanterne allumée faisait une tache sanglante qui tremblotait. Cette lueur éclairait mal, La jeune fille fit quelques pas dans le carrefour ; mais soudain elle recula avec un cri d’horreur : elle venait de voir au-dessous de la lanterne une face effrayante qui la regardait.

Au cri poussé par la jeune fille, d’autres cris répondirent jetés par d’innombrables corbeaux qui, réveillés brusquement, s’envolèrent et se mirent à tournoyer d’une façon incohérente. Omiti fut toute enveloppée de ce vol sinistre. Immobile de terreur, elle se croyait la proie d’une hallucination et écarquillait les yeux tâchant de comprendre ce qu’elle voyait. Cette face la regardait toujours ; elle avait de la neige dans les sourcils, sur les cheveux, la bouche ouverte, les yeux hagards. Omiti avait cru d’abord voir un homme adossé au poteau, mais en regardant mieux, elle s’aperçut que cette tête qui n’avait pas de corps était accrochée par les cheveux à un clou.