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en baissant les yeux. Je ne me doutais de rien, lorsqu’un jour la jalousie m’a révélé mon amour.

— Toi, jalouse ?

— Oui, et follement ; j’éprouvais une douleur étrange, continuelle, je ne dormais plus, les plaisirs m’irritaient, la colère à chaque instant m’emportait et je rudoyais mes femmes ; celle que je croyais aimée de toi, je la pris en haine ; un soir, je la chassai de ma présence parce qu’elle avait, en te voyant, trahi son amour par un cri. Tu étais là adossé à un arbre. Je rentrai dans mon palais. Je te vois encore éclairé par la lune, pâle avec tes yeux ardents.

— N’as-tu pas vu qu’ils ne regardaient que toi ?

— Non, et toute la nuit, silencieusement je pleurai.

— Oh ! ne me rends pas fou ! s’écria le prince.

— Tu vois, dit-elle, je ne te cache rien, je mets mon cœur à nu devant toi, confiante en ta loyauté.

— Je suis digne de cette confiance, dit le prince, mon amour est aussi pur que le tien.

— Quelques jours plus tard, continua la reine, tu étais devant moi, à genoux, dans la salle des audiences. Surprise de ton trouble, je me laissai aller à te parler de ma fille