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L’USURPATEUR

sée depuis longtemps, et emmenée dans ses États.

— Mais l’affection qu’il porte à son maître le retient à la cour d’Osaka !

— C’est ce qu’il dit ; mais est-ce ainsi que parle l’amour ? Que ne sacrifierai-je pas pour lui !… hélas ! J’ai soif de sa présence ! son visage si hautain, si doux pourtant, il passe devant mes yeux, je voudrais le fixer, mais il s’échappe. Ah ! quelques mois heureux passés près de lui, je me tuerais ensuite, m’endormant dans mon amour, et le bonheur passé me serait un doux linceul.

Fatkoura éclata en sanglots et jeta son visage dans ses mains. Tika s’efforça de la consoler ; elle l’entoura de ses bras et lui dit mille douces paroles, mais ne put réussir à l’apaiser.

Tout à coup, un bruit se fit entendre au fond de l’appartement. Le petit chien se mit à japper dans un ton suraigu.

Tika se releva vivement et bondit hors de la salle, afin d’empêcher tout serviteur d’y pénétrer et d’apercevoir l’émotion de sa maîtresse ; elle revint bientôt toute joyeuse.

— C’est lui ! c’est lui ! s’écria-t-elle ; il est là, il veut te voir.

— Ne dis pas de folies, Tika, dit Fatkoura en se dressant sur ses pieds.

— Voici son billet de visite, dit la jeune fille.