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Le prince, suivi de Loo, se dirigea vers le plus bruyant de ces établissements ; mais, à sa grande surprise, lorsqu’il pénétra dans la galerie déjà pleine de monde, il fut salué par des acclamations enthousiastes.

— C’est mon brave Sado qui me vaut cette popularité, se dit-il.

— Le seigneur ! le seigneur ! criait-on.

— Que l’on apporte du saké ! Eventrons les tonneaux ! Le daïmio veut que l’on soit ivre !

— Nous le serons ! nous le serons ! au point de ne pas distinguer la lune d’avec le soleil !

— Mais il faut beaucoup de saké, beaucoup, beaucoup ! Alors nous pourrons chanter l’antique chanson de Daïnogon-Ootomo !

Ils entonnèrent en chœur cette chanson :

« Y a-t-il quelque chose au monde de plus précieux que le saké ?

« Si je n’étais un homme, je voudrais être un tonnelet. ».

Cependant un matelot, nu jusqu’à la ceinture, à la figure large et peu avenante, s’avança vers le prince.

— Nous boirons plus, tard, dit-il. Tu m’as, la dernière fois que nous nous sommes vus, fendu la joue d’un coup de poing ; je veux t’enfoncer une côte ou deux ; ensuite, nous serons amis.