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— Qu’il est charmant !

— On dirait une femme !

— Oui, mais quelle énergie dans son regard !

— Quelle froideur aussi ! sa gravité tranquille inquiète et effraie.

— Il doit être terrible dans la bataille.

— Terrible aussi pour celle qui l’aimerait, son cœur doit être d’acier comme son glaive, ne le regardons pas tant.

Nagato chevauchait près de la reine.

— Ces événements vont retarder ton mariage, Ivakoura ! dit-elle avec une certaine émotion joyeuse.

— Oui, reine, dit le prince, et les hasards de la guerre sont grands, peut-être n’aura-t-il jamais lieu. Cependant, puisque Fatkoura est publiquement ma fiancée, je veux qu’elle aille, en attendant les noces, s’établir dans mon château d’Hagui, près de mon père ; si je meurs, elle portera mon nom et sera souveraine de la province de Nagato.

— Tu auras raison d’agir ainsi, dit la Kisaki, mais la mort t’épargnera. Je ferai des vœux pour que tu demeures sain et sauf.

Nagato leva vers elle un regard plein de reproches. Il n’osa parler, mais ce regard disait toute sa pensée, il signifiait : « Tu sais bien que la mort me serait plus douce que l’union que tu m’as imposée. »