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jour vert, reflet des arbres voisins. Les murailles étaient merveilleusement décorées : des animaux fabuleux, l’oiseau foo, la licorne, la tortue sacrée se détachaient sur des fonds d’azur, d’or ou de pourpre, et un paravent en émaux cloisonnés couleur turquoise et feuille morte, décrivait ses zigzags derrière l’estrade. Aucun meuble, rien que d’épais tapis, des coussins, des draperies de satin historiées d’oiseaux, brodés dans des cercles d’or.

— Je vous déclare tout d’abord, dit la Kisaki, que je ne dirai pas un mot. Je suis prise d’une nonchalance, d’une paresse invincibles. D’ailleurs, je veux entendre des histoires et non en conter.

On se récria beaucoup contre cette décision.

— C’est irrévocable, dit la reine en riant ; vous n’obtiendrez même pas quelques paroles de flatterie, votre narration achevée.

— N’importe ! s’écria Simabara, je vais raconter l’histoire du loup changé en jeune fille.

— C’est cela ! c’est cela ! s’écrièrent les femmes ; le titre a notre approbation.

— Un vieux loup…

— Ah ! il est vieux, ce loup ? dit une jeune princesse avec une moue dédaigneuse.

— Vous savez bien que pour donner asile à une âme humaine, un animal doit être vieux.