Page:Gautier - L’Usurpateur, tome 1.djvu/15

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
9
LE BOIS DE CITRONNIERS

l’heure de son lever est proche ; nous nous reverrons au conseil.

— Il va donc falloir sourire à cette laide figure, grommela Nagato.

Mais il avait son congé : il salua le siogoun et s’éloigna d’un air boudeur.

Fidé-Yori continua à se promener dans l’avenue, mais il revint bientôt vers le bois de citronniers. Il s’arrêta devant lui pour l’admirer encore, et cueillit une mince, branche chargée de fleurs. Mais alors les feuillages se mirent à bruire comme sous un grand vent ; un brusque mouvement agita les branches et entre les fleurs refoulées une jeune fille apparut.

Le prince se recula vivement et faillit jeter un cri ; il se crut le jouet d’une vision.

— Qui es-tu ? s’écria-t-il ; peut-être le génie de ce bois ?

— Oh ! non, dit la jeune fille d’une voix tremblante ; mais je suis une femme bien audacieuse.

Elle sortit du bois au milieu d’une pluie de pétales blancs et s’agenouilla dans l’herbe en tendant les mains vers le roi.

Fidé-Yori baissa la tête vers elle et la regarda curieusement. Elle était d’une beauté exquise : petite, gracieuse, comme écrasée sons l’ampleur de ses robes. On eût dit que c’était leur poids soyeux qui l’avait jetée à