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L’ORIENT.

laisse rougeoyer un fond de paillon pourpre ; plus loin, l’argent et l’or font combattre leur éclat blanc et jaune sur un champ de bataille rose. Mais quel rose ! un rose idéal, un rose d’intérieur de clochette à l’heure de la rosée ! Partout l’or scintille en paillettes, en mouches, en filigrane, en fleurs, en étoiles, en pasquilles, en effilé, en fanfreluches ; il y a des moments où cela touche au délire.

On dirait que le luxe indien a voulu engager une lutte directe avec le soleil, avoir un duel à mort avec la lumière dévorante de son ciel embrasé ; il essaye de resplendir d’un éclat égal sous ce déluge de feux ; il réalise les merveilles des contes de fées ; il fait des robes couleur du temps, couleur du soleil, couleur de la lune ; métaux, fleurs, pierreries, reflets, rayons, éclairs, il mélange tout sur sa palette incandescente. Dans un tulle d’argent il fait palpiter des ailes de cantharides, émeraudes dorées qui semblent voler encore. Avec les élytres des scarabées, il compose des feuillages impossibles à des fleurs de diamant. Il profite du frison fauve