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L’ORIENT.

nettes de verre noir comme pour regarder une éclipse, et plongez l’œil dans ces armoires, vestiaires des fées, des péris et des apsaras. Les cachemires passent en Europe pour des tissus somptueux. Une femme se croit riche lorsqu’elle peut en enfermer une demi-douzaine dans son coffre de palissandre. Là-bas, l’on en fait des rideaux de lit, des tentures d’appartement, des tapis de table ou de pied ; ils remplacent, pour les tentes, la toile ou le coutil grossier. En voilà pourtant cinq ou six admirables, bleus, rouges, noirs, verts, avec des palmes de trois pieds de haut, si souples qu’ils font des plis comme une draperie de Phidias, si fins qu’ils passeraient par une bague ; là, ils ne servent que d’ombre au tableau.

On ne commence à les regarder que lorsque les palmes sont d’or et les fleurs de perles, et que le fond écarlate se constelle de disques éclatants de broderie : mais ils pâlissent bien vite à côté de ces étoffes rayées en long, en diagonale, qui mêlent à leurs splendeurs des tons si fins que Rubens, Paul Véronèse, De-