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L’ORIENT.

violence pour cette fois à sa modestie ordinaire. Dans le bazar de Smyrne nous avons rencontré plusieurs Syriens arrangés de la sorte, et rien n’est plus pittoresque que cette coiffure bariolée d’or et de couleurs éclatantes, avec ses longs cordons de soie dont les nœuds et les houppes se répandent gracieusement sur les épaules. — Quand on pense que les nations prétendues civilisées portent sur la tête des boisseaux de carton revêtus de peluche noire, c’est à mourir de honte !

Sous cet accoutrement, qui n’était pas une simple fantaisie d’artiste, mais une sorte de domino assurant la liberté de l’observateur parmi ce carnaval de costumes, Gérard de Nerval put circuler partout sans exciter la défiance, observer les détails de mœurs, assister à des cérémonies religieuses d’où l’eût banni, comme profane, le fanatisme musulman ; et il fut, à l’enterrement d’un santon célèbre, témoin d’un miracle turc, occasion rare ! Le santon, de son vivant, était un homme d’un caractère bizarre, et la mort en avait fait un cadavre fantasque. Son corps se refusait à