Calemard de la Fayette les possède toutes deux, car il n’est pas, qu’on nous permette cette innocente plaisanterie, un agriculteur en chambre ; il connaît la campagne pour l’avoir cultivée : il a de vrais prés, de vraies vignes, de vraies fermes, de vrais bœufs. Chose rare pour un poëte, il sait distinguer le blé de l’orge et le trèfle du sainfoin. Dans cette saine vie de gentleman farmer il a pris sérieusement goût à la nature et aux occupations rustiques, et sa rêverie se mêlant à son travail, il a fait, au jour le jour, presque sans y songer, en marchant le long de ses pièces de blés ou de ses haies d’aubépine en fleur, le Poëme des champs, qui a sur tous les ouvrages de ce genre l’avantage de sentir le foin vert plus que l’huile de la lampe. Les descriptions ont été faites ad vivum, comme disaient les anciens peintres, non pas d’après un croquis rapide, mais d’après des études terminées avec conscience devant un modèle qui n’était pas avare de ses séances. On voit à la précision du dessin et à la justesse de la couleur que le peintre a longtemps vécu dans l’intimité de son sujet, et que son enthousiasme pour la vie champêtre n’a rien de factice.
La fable d’un semblable poëte ne saurait être bien compliquée, et Calemard de la Fayette a eu le bon goût de ne pas chercher à y introduire une action romanesque ou des épisodes superflus. Les semailles, les moissons, la vendange, les tableaux variés des saisons, la peinture de la ferme, des étables, de la basse-cour, des chevaux allant à l’abreuvoir,