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D’Arsène Houssaye à Amédée Pommier il ne faut pas chercher de transition, ils n’ont de commun que leur constant amour de l’art. Ce n’est pas d’hier qu’il est descendu dans l’arène ; son premier volume date de 1832, et son dernier porte le millésime de 1867. Il a la fécondité opiniâtre, et huit ou dix recueils ne l’ont pas épuisé. Il est un versificateur de première force, et nul ne façonne et xie retourne avec plus de précision sur l’enclume poétique un alexandrin ou un vers de huit pieds. S’il faut remettre le fer au feu de la forge, ce qui arrive rarement, tant son coup de marteau est sûr, il remue le charbon, active l’haleine du soufflet, et la forme voulue est bientôt imposée au métal rebelle. Le poëte se plaît à cette lutte, et il s’agite comme un Vulcain dans son antre, heureux de voir voler à droite et à gauche les rouges étincelles et d’entendre le rhythme sonore retentir sous la voûte. De ce rude travail il lui reste parfois au front des parcelles de limaille et de charbon ; mais le vers bien fourbi reluit, comme de l’acier, et l’on n’y saurait trouver une paille. Amédée Pommier égale, s’il ne la dépasse, l’habilelé métrique de Barthélémy et de Méry, et il eût au besoin fait tout seul la Némésis. Les principaux volumes de M. Pommier sont le Livre de sang, Océanides et fantaisies, Sonnets sur le salon de 1851, Colères, Colifichets, où l’auleur s’est livré à tous les tours de force métriques qu’on puisse imaginer, avec une aisance, une agilité et une souplesse incomparables. On peut dédaigner ces jeux difficiles