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sœurs et des cousines. Aux Nuits de mai, d’août, d’octobre, de novembre et de décembre se joignirent d’innombrables Nuits qui avaient la meilleure envie d’être élégiaques et lyriques, mais qui ne servirent qu’à montrer combien le génie de l’auteur était inimitable.

La poésie philosophique trouvait un interprète dans Laprade, dont le poëme de Psyché contient les développements de l’âme humaine arrivant à une plus haute conscience d’elle-même à travers les phases et les épreuves des civilisations. Laprade se rapproche plutôt de la manière d’Alfred de Vigny que de celle de Victor Hugo, quoiqu’il ait dans son idéalité un peu abstraite un accent propre qui s’accusa plus tard avec une décision suprême dans la magnifique pièce adressée à un chêne, qui est le chef-d’œuvre et comme la note dominante du poôte. Il a prolongé depuis et répété contne à plaisir cette note en l’affaiblissant peut-être, mais il est resté parmi nous l’hiérophante de la nature végétale et des solitudes alpestre, une espèce de druide ou plutôt de prêtre de Dodone. Il a trouvé pour dire les grands arbres des vers d’une sonore amplitude, d’un nombre majestueux et grave dont l’écho se ressaisit chez maint descriptif venu après lui. Sa muse possède

La lente majesté du port et de la taille.

Un des premiers, Laprade a remis en honneur dans la poésie les dieux du paganisme et tourné ses yeux vers la Grèce, abandonnée comme trop classi-