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EXCELLENCE DE LA POÉSIE.

Planche, malgré une sécheresse sévère qui lui est propre, est un prosateur distingué et un critique d’un goût assez fin, qui sait mieux que personne comment ne se font pas les mauvais vers, s’il ne sait pas comment se font les bons. On sait aussi ce qu’il est advenu lorsque le grand mystique Edgard Quinet, le chantre d’Ashaverus, s’est mis à rimer pour avoir l’auréole complète.

Les exemples contraires sont très nombreux. M. Hugo, le poète des Odes et ballades, des Orientales, d’Odes et ballades, des Orientales, d’Hernani, de Marion Delorme, l’homme qui a le plus approché de Corneille, et qui est incontestablement le premier lyrique français, a une prose non moins belle que ses vers, une prose sculpturale, d’une fermeté et d’une vigueur qui ne sont surpassées par personne ; il quitte indifféremment la lyre pour la plume et la plume pour la lyre. Sa phrase est aussi belle que son vers, proportion gardée de la différence des matières qu’il travaille ; le diamant vaut toujours mieux que le cristal. Le diamant coupe le cristal, ce que le cristal ne saurait faire au diamant, quoiqu’il ait en apparence la même eau, la même limpidité et les mêmes feux.

M. de Lamartine écrit en prose avec éloquence et facilité ; l’auteur de Joseph Delorme et des Consolations se distingue par le vétilleux travail et l’acutesse délicate de sa phraséologie. M. Alfred de Vigny a fait Cinq-Mars, qui vaut bien Eloa. Les co-