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même les plus gentils et les plus dociles, une calamité diurne et nocturne dont on se débarrasse par les pensionnats, au grand détriment de l’éducation de famille, la meilleure de toutes. Où voulez-vous que soit un enfant, dans un appartement comme ceux que nous venons de décrire ? Avec la pétulance naturelle à son âge, il gêne partout, au salon comme à la salle à manger, dans le cabinet de toilette comme dans la chambre à coucher. Il importune, on le rudoie, on le renvoie à la cuisine avec la bonne ; ce n’est pourtant pas sa faute s’il est insupportable, c’est la faute de l’architecte et du propriétaire.

Comment se fait-il que cette pièce indispensable à tout ménage n’existe nulle part ? Ne serait-il pas raisonnable, hygiénique, moral et même commode que les babies eussent leur chez eux dans la famille, une chambre claire, tranquille, bien exposée, avec leurs blanches couchettes, leurs pots à l’eau, leurs éponges, leurs baignoires et leur table servie à part ; car la nourriture de l’adulte, que l’enfant partage dans la plupart des familles, n’est pas faite pour lui ; elle est trop succulente, trop épicée, trop multiple ; elle le surexcite, l’hypertrophie, l’échauffe, le blase, précipite sa puberté et lui cause de nombreuses maladies, ou tout au moins lui inflige le supplice de Tantale si on n’accorde à sa gourmandise qu’un certain nombre de mets.

Autre inconfortabilité, autre manque absurde. —