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On sait que le seigneur Karageuz, qu’on n’a pas osé admettre à l’Exposition parce que, à sa seule apparition, avant qu’il eût fait un seul geste et dit un seul mot, il eut été traîné au violon, est, en pays musulman, le guignol des fillettes et des jeunes garçons, qui l’applaudissent et l’acclament.

Ayoucha est certainement une personne très forte dans son art, une danseuse de premier ordre ; c’est presque une acrobate. Les différentes parties de son corps, qui doivent se mouvoir successivement, sont absolument indépendantes les unes des autres, et leurs contractions localisées laissent le reste de la personne tout à fait immobile. En dépit de l’exécution parfaite et de l’harmonie rythmique des mouvements, nous ne pouvons trouver cet exercice-là ni joli, ni gracieux. Cette mince créature, dont le cou, la poitrine, le ventre, se gonflent et s’agitent, fait irrésistiblement penser à un serpent dont la digestion est difficile parce qu’il a avalé une proie trop grosse.