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110 Sur palies blancs siédent cil chevalier,
As tables juent pur els esbaneier,
E as eschas li plus saive e li vieill ;
E escremissent cil bacheler legier.
Desuz un pin, delez un eglentier,
115 Un faldestoel i ont, fait tut d’or mier :
Là siet li reis ki dulce France tient ;
Blanche ad la barbe e tut flurit le chief,
Gent ad le cors e le cuntenant fier.
S’est ki l’ demandet, ne l’ estoet enseignier.
120 E li message descendirent à pied,
Si F saluèrent par amur e par bien.Aoi.


IX


Blancandrins ad tut premereins parlet,
E dist à l’ Rei : « Salvez seiez de Deu,
« Le Glorius, que devez aürer !
125 « Iço vus mandet reis Marsilies li bers :
« Enquis ad mult la lei de salvetet ;
« De sun aveir vus voelt asez duner.
« Urs e leuns e veltres caeignez,
« Set cenz cameilz e mil osturs muez,

111. As tables juent. Le jeu des tables (c’est le trictrac), et, plus encore, celui des échecs tiennent une très grande place dans nos romans ; c’est, par excellence, le jeu des barons. Une partie d’échecs est la péripétie principale d’une de nos plus anciennes chansons, d’Obier le Danois. Le fils d’Ogler, Baudouinet, joue aux échecs avec Chariot, le fils de Charlemagne : il gagne la partie. Chariot, furieux d’avoir été échec et mat en quelques coups, se précipite sur son adversaire et, d’un coup d’échiquier, le tue sur place. De là toute la guerre de Charlemagne contre Ogter. Dans Renaus de Montauban, même épisode. La lutte entre les fils d’Aimon et le grand empereur a pour cause ou pour prétexte une partie d’échecs, à la suite de laquelle le neveu de l’Empereur, Bertolais, est

tué par Renaud. (Edit. Michelant, p. 51.) — Voy., dans le Saint Martin de M.Lecoy de la Marche (Manie, 1881. p. 38), la représentation d’un pion pour jeu de tables.

118. Gent ad le cors. S’il faut en croire la Chronique de Turpin, le grand empereur avait huit pieds de haut. Sur ses deux mains il élevait un cavalier armé et brisait aisément trois ou quatre fers à cheval. Tous nos poêtes ont célébré la barbe blanche de Charles, ses yeux extraordinairement ardents et sa terrible regardeüre. Et tout le moyen âge a eu peur de ce regard, semblable à cet évêque dont parle le moine de Saint-Gall, sur lequel l’Empereur jeta seulement un coup d’œil et qui fut soudain foudroyé. Cf. nos Épopées françaises, 2e édition, II, 121.

124. Le Glorius. On pourrait aisé-