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Le Roi mande alors Clarin de Balaguer,
Avec Estramarin et son pair Eudropin,
65Priamus avec Garlan le barbu,
Machiner avec son oncle Matthieu,
Joïmer avec Maubien d’outre-mer,
Et Blancandrin, pour leur exposer son dessein.
Il fait ainsi appel à dix païens, des plus félons :
70« Seigneurs barons, vous irez vers Charlemagne,
« Qui est en ce moment au siège de la cité de Cordoue.
« Vous porterez dans vos mains des branches d’olivier,
« En signe de soumission et de paix.
« Si vous avez l’art de me réconcilier avec Charles,
75« Je vous donnerai or et argent,
« Terres et fiefs autant que vous en voudrez.
« — Notre seigneur parle bien, » s’écrient les païens.Aoi.


VI


Le conseil de Marsile est terminé :
« Seigneurs, » dit-il à ses hommes, «vous allez partir
80« Avec des branches d’olivier dans vos mains.
« Dites de ma part au roi Charles
« Qu’au nom de son Dieu il ait pitié de moi :
« Avant qu’un seul mois soit passé,

se vante, en effet, dans un autre passage de notre poème (V. 200), d’avoir conquis cette ville à Charlemagne.

71. Cordres. Nous avions, dans nos précédentes éditions, partagé sur Cordres l’opinion de M. Gaston Paris, « II est certain, disions-nous, que la ville désignée par « Cordres » est près des Pyrénées. » Et, dans notre carte du Roland (première édition, t. II, frontispice), nous l’avions placée entre Valtierra et Tudela. Mais l’étude des anciennes cartes "nous a fait changer d’avis. Nos pères du XIe siècle ne connaissaient que le nord de l’Espagne et ne supposaient pas que cette péninsule eût de la profondeur. Dans cette légère bande de terrain, au sud des Pyrénées, ils plaçaient toutes les villes qui avaient eu jadis quelque renommée ;

Cordoue, Séville, etc. = En somme, nos épiques avaient dans la mémoire un certain nombre de noms de lieux célèbres qu’ils décernaient un peu au hasard. L’auteur du Roland est à coup sûr le plus sérieux de tous, et néanmoins il n’est pas incapable d’avoir complètement ignoré la situation de Cordoue, dont il ne savait que le nom, et qu’il se figurait sans doute au nord de l’Espagne.

72. Branches d’olive. Ces branches d’olive sont un symbole de paix emprunté à l’antiquité. On les retrouve plus d’une fois aux mains des ambassadeurs dans nos autres Chansons de geste : Portèrent rains d’olive : c’est senefiement — De pais, d’umilitè, que il la vont querant. (Renaus de Montauban. édit, Michelant, p. 37.) Etc. etc,