Page:Gautier - Chanson de Roland onzieme edition 1881.djvu/432

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mieux parler, la constatation d’un état plus ancien de la légende rolandienne. Cf. Guido Laurentius (Zur kritik der Chanson de Roland).

IX. Sur des traditions vagues ont été écrits, au XIIe siècle et postérieurement, toute une série de poèmes qui sont moitié légendaires, moitié fictifs. Sur la donnée de la prise de Rome par les Sarrasins reposent : l’ancien poème de Balant que M. G. Paris a reconstitué, notre Fierabras et même notre Aspremont, auquel se mêlent quelques autres traditions.

X. Avec quelques Contes universels, et qui se retrouvent en effet dans tous les pays (le Traître, l’Epouse innocente et réhabilitée, etc.), on a composé la légende de l’Enfance de Charles, et cela depuis la fin du XIIe siècle ou le commencement du XIIIe. Cette légende se retrouve dans les Enfances Charlemagne de Venise (fin du XIIe siècle) ; dans le Mainet en vers français, dont on a tout récemment découvert quelques fragments (XIIe siècle) ; dans la Chronique saintongeaise (commencement du XIIIe siècle) ; dans Berte aux grans piés (vers 1275) ; dans le Stricker de 1230 ; dans la Chronique de Weihenstephan (original du XIVe siècle, ms. du XVe ; dans la Chronica Bremensis de Wolter (XVe siècle) ; dans le Charlemagne de Girard d’Amiens (commencement du XIVe siècle) ; dans la Karlamagnus Saga (second tiers du XIIIe siècle) ; dans le Karl Meinet (commencement du XIVe siècle) ; dans les Reali (vers 1350), etc.

XI. Cependant, pour combattre les prétentions des légendaires français, on inventait en Espagne certaines légendes destinées à ruiner la gloire de Roland. Telle est la signification de la Chronica Hispaniæ, de Rodrigue de Tolède' (1247), de la Cronica general d’Alphonse X (seconde moitié du XIIIe siècle) et de quelques Romances que nous avons citées plus haut.

XII. Enfin, il faut considérer les poèmes suivants comme des œuvres uniquement littéraires et de pure imagination : Jehan de Lanson, — Simon de Pouille, — Otinel, — la dernière partie de l’Entrée en Espagne (Roland en Orient), — Gui de Bourgogne, — Gaydon, — Anseïs de Carthage, — Galien, — la fin du Voyage à Jérusalem et quelques parties de Girars de Viane.

C’est ainsi que s’étagent toutes nos chansons de geste, depuis celles qui sont le plus historiques jusqu’à celles qui ne sont même plus légendaires et qui sont des « romans » dans l’acception la plus moderne de ce mot.