Page:Gautier - Chanson de Roland onzieme edition 1881.djvu/429

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Macaire, Charlemagne n’a qu’un rôle fort effacé. Il s’agit cependant de sa femme, de celle Blanchefleur qui est la fille de l’empereur de Constantinople. Un traître, Macaire, accuse la reine d’adultère, et elle va mourir, quand, à la prière de l’abbé de Saint-Denis, on se contente de l’exiler. Un bon chevalier, Aubri, est chargé de l’accompagner, mais il est tué par le traître Macaire, qui du moins ne peut tuer Blanchefleur. Le chien d’Aubri venge son maître. Cependant un pauvre bùcheron, Varocher, recueille la pauvre reine, qui s’est enfuie jusqu’en Hongrie. L’empereur de Constantinople réunit une grande armée, et envahit la France pour venger sa fille dont, après cent combats, l’innocence est enfin reconnue. Le fils de Charles, Louis, était né durant cet exil : il deviendra le successeur du grand empereur. (Macaire, poème de la fin du XIIe siècle. V. l’éd. Guessard, dans le Recueil des Anciens poètes de la France[1].)

Dans Huon de Bordeaux, Charlemagne ne paraît guère que comme un accessoire, et, à coup sûr, comme un personnage secondaire. Au début de son œuvre, l’auteur nous représente l’Empereur sous les traits d’un vieillard tout près de la mort. Même il est tellement épuisé par l’âge, qu’il veut se faire élire un successeur. Par malheur, il n’a qu’un fils qu’il engendra à cent ans. C’est Charlot, c’est un étourdi de vingt-cinq ans. Le vieux roi veut du moins lui donner ses derniers conseils, et il les lui donne très religieux, très beaux. (Huon de Bordeaux, poème composé entre les années 1180 et 1200, éd. du Recueil des Anciens poètes de la France, vers 29-199.) Là-dessus arrive un traître, Amauri, qui soulève la colère du vieil empereur contre Huon et Gérard, fils du duc Seguin de Bordeaux. Dans ce conseil perce la haine personnelle d’Amauri, que Seguin a jadis plus ou moins justement appauvri et dépouillé. Mais Naimes est là, et il défend les Bordelais. On envoie un message à Huon et à Gérard ; on leur mande de venir à la cour de Charlemagne. (Ibid., 200-392.) Ils se mettent en route, mais sont forcés de franchir mille obstacles accumulés par les traîtres ; Huon doit en venir aux mains avec le propre fils du roi, avec Charlot, et il le tue. (Ibid., 393-890.) Grande colère de Charles contre le meurtrier de son fils : Huon est condamné à un combat singulier avec le traître Amauri. Il tranche la tête du misérable, et le jugement de Dieu se prononce en sa faveur. (Ibid., 891, -2129.) Malgré cette intervention céleste, Charles ne veut point pardonner au vainqueur, et il faut que les Pairs menacent de le quitter, pour qu’il se décide enfin à accorder à Huon une paix dont il se réserve de dicter les conditions. Il est ordonné au jeune Bordelais d’aller à Babylone porter un message à l’amiral Gaudisse. Huon part sur-le-champ, et court à ses aventures. (Ibid., 2130-2386.) Nous n’avons pas à les raconter ici, ni à faire suivre à notre lecteur les péripéties de l’amitié d’Huon avec le nain Oberon. (Ibid., 2387-8647.) Il lui suffit de savoir qu’un jour Huon revient en France, et qu’il y trouve son propre héritage occupé par son frère Gérard. (Ibid., 8648-9110.) Charlemagne est encore vivant, et la cause des deux frères ennemis est portée devant sa cour. Huon est très injustement condamné à mort, et va périr, lorsque Oberon arrive à.son secours et le sauve. (Ibid.,

  1. Il existe une autre version, intitulée la Reine Sibille, et dont nous n’avons plus que quelques vers et une rédaction en prose. (Bibl. de l’Arsenal, 3351 ; anc. B. L. F. 226.)