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rend le dernier soupir[1].

CHARLEMAGNE EN BRETAGNE.

« Acquin, empereur des Sarrasins, » s’est rendu maître de la Petite-Bretagne. Il habite le palais de Guidalet ; mais Charlemagne, lassé de la paix, s’apprête à marcher contre les envahisseurs norois. (Acquin, poème de la fin du XIIe siècle, conservé dans un manuscrit détestable du xve, B. N. fr. 2233, f° 1, r°.) Charles arrive à Avranches et s’installe à Dol. « Commençons la guerre, » dit l’Archevêque. (Ibid., f° 1, v° — 3, r°.) La situation des chrétiens est difficile. Une ambassade est, sur le conseil de l’archevêque de Dol, envoyée à Acquin par Charlemagne. Les messagers de l’Empereur, insolents comme toujours, sont sur le point d’être tués par les Norois ; mais la femme du roi païen intercède en leur faveur. (Ibid., f° 37° — 7, v°.) Naimes est d’avis de commencer immédiatement la guerre et de mettre le siège devant Guidalet. Dans une première bataille, les chrétiens sont vainqueurs. (Ibid., f° 7, v° — 16, r°.) Leurs perles sont d’ailleurs considérables, et le père de Roland, Tiori, meurt sur le lieu du combat. Malgré tout, les Français s’emparent de Dinart et investissent Guidalet. Le siège est long et rude. Même un jour, l’armée de Charles est surprise et vaincue. (Ibid., r° 17, 7° — 30, r°.) Naimes n’échappe à la mort que grâce à un miracle. (Ibid., f° 31-33.) Mais Guidalet tombe enfin au pouvoir des Bretons et des Français, et Gardainne est miraculeusement anéantie par un orage envoyé de Dieu. (Ibid., f° 33-50, v°.) Un duel de Naimes et d’Acquin paraît terminer la Chanson[2]. Acquin meurt, et sa femme est baptisée. (Ibid., f° 50-55.)

FIERABRAS ET OTINEL.

Charles est, une fois de plus, en guerre avec les païens : même il vient de leur livrer une bataille longuement disputée. (Fierabras, poème du XIIIe siècle, éd. Groeber et Servois, v. 24-45. M. Groeber a publié dans la Romania une première branche du Fierabras qui a pour titre : La Destruction de Rome, et où est racontée en effet la prise de la ville des Papes par l’émir Balant et les Sarrasins ). Un géant sarrasin, haut de quinze pieds, défie un jour tous les chevaliers de Charlemagne. Or, c’est lui, c’est Fierabras qui a massacré les habitants de Rome et qui, maître du saint sépulcre et de Jérusalem, possède toutes les reliques de la Passion : le baume avec lequel Notre-Seigneur fut enseveli, l’enseigne de la croix, la couronne et les clous. (Ibid., v. 50-66.) Au défi du païen, c’est Olivier qui répond. Le duel terrible va commencer : il s’engage. (Ibid., 93-368.) Le géant a trois épées, et le baume divin, dont il emporte avec lui plusieurs barils, guérit en un instant toutes les blessures qu’il peut recevoir. Cependant Olivier ne recule point devant un tel adversaire, cherche à le convertir, s’empare des barils miraculeux qu’il jette dans la mer, et porte au Sarrasin un coup vainqueur. Fierabras s’avoue vaincu et demande à grands cris le baptême. (Ibid., 369-449

  1. Voir le Roman en prose de Galien, qui nous est parvenu sous trois formes (Bibl. de l’Arsenal, 3351 ; Bibl. nat. tr. 1470 ; et Galien incunable, 1500, Vérard, etc.). Ces romans en prose sont visiblement dérivés d’un roman en vers de la fin du XIIIe siècle dont nous avons reconstitué plusieurs centaines de vers au t. III de la 2e édition de nos Épopées françaises. Et cette chanson elle-même avait été précédée par un ou deux autres poèmes qui ne sont point parvenus jusqu’à nous.
  2. Dans ce poème, dont nous ne possédons pas de version complète, l’élément littéraire est plus considérable que l’élément traditionnel. On y rencontre cependant des légendes visiblement antiques. Mais tout a été écrit en dehors de la Chanson de Roland et de notre légende.