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CCCVI

Vers Charlemagne retournent les barons,
« Sire, » lui disent-ils, « nous vous prions
« De tenir quitte le comte Ganelon :
« Il vous servira désormais avec foi, avec amour.
« Laissez-le vivre ; car il est vraiment gentilhomme.
« Roland, d’ailleurs, est mort ; nous le ne reverrons plus ;
« Et ce n’est point l’or et l’argent qui pourront nous le rendre.
« — Vous n’êtes tous que des félons, » s’écrie le Roi.Aoi.

CCCVII

Quand Charles voit que tous lui font défaut, -
Il baisse la tête,
Et, de la douleur qu’il ressent : « Malheureux que je suis ! » s’écrie-t-il.
Mais voici devant lui un chevalier : c’est Thierri,
Le frère au duc Geoffroi d’Anjou.
Thierri a le corps maigre, grêle, allongé ;
Ses cheveux sont noirs, ses yeux sont bruns ;
Il n’est d’ailleurs ni grand ni trop petit.
Et il a dit courtoisement à Charles :
« Ne vous désolez pas, beau sire roi.
« Vous savez que je vous ai déjà bien servi ;
« Or, par mes ancêtres, j’ai droit à siéger parmi les juges de ce procès.
« Quelle que soit la faute dont Roland se soit rendu coupable envers Ganelon,
« Votre intérêt eût dû lui servir de défense.
« Ganelon est un félon, Ganelon a trahi votre neveu ;
« Devant vous il vient dé se mettre en mauvais cas, de se parjurer.
« Pour tout cela je le condamne à mort. Qu’oui le pende,
« Et puis qu’on jette son corps aux chiens :
« C’est le châtiment des traîtres.
« Que s’il a un parent qui me veuille donner un démenti,
« Avec cette épée que j’ai là, à mon côté,