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CCXXXVIII

« Ami Roland, je vais retourner en France ;
« Et, quand je serai dans ma ville de Laon,
« Des étrangers viendront de plusieurs royaumes
« Me demander : « Où est le Comte capitaine ? »
« Et je leur répondrai : « Il est mort en Espagne. »
« En grande douleur je tiendrai désormais mon royaume :
« Il ne sera point de jour que je n’en gémisse et n’en pleure.Aoi.

CCXXXIX

« Ami Roland, vaillant homme, belle jeunesse,
« Quand je serai à ma chapelle d’Aix,
« Des hommes viendront, qui me demanderont de tes nouvelles ;
« Celles que je leur’ donnerai seront dures et cruelles :
« Il est mort, mon cher neveu, celui qui m’a conquis tant de terres.
« Et voilà que les Saxons vont se révolter contre moi,
« Les Hongrois, les Bulgares, et tant d’autres peuples,
« Les Romains avec ceux de la Pouille et de la Sicile,
« Ceux d’Afrique et de Califerne.
« Mes souffrances augmenteront de jour en jour.
« Eh ! qui pourrait conduire mon armée avec une telle puissance»
« Quand il est mort, celui qui toujours était à notre tête ?
« Ah ! douce France, te voilà orpheline !
« J’ai si grand deuil que j’aimerais ne pas être. »
Et alors il se prend à tirer sa barbe blanche,
De ses deux mains arrache les cheveux de sa tête :
Cent mille Français tombent à terre, pâmés.Aoi.

CCXL

« Ami Roland, tu as donc perdu la vie :
« Que ton âme ait place au paradis !
« Celui qui t’a tué a déshonoré la douce France :

vant, où il s’agit d’Aix, sur une tradition du VIIIe ou IXe siècle.