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« Nos chevaux sont las et épuisés ;
2485« Enlevez-leur les selles et les freins,
« Et laissez-les se rafraîchir dans les prés.
« — Sire, » répondent les Français, «vous dites bien, »Aoi.

CCXII

L’Empereur prend là son campement ;
Les Français descendent de cheval entre Valterne et l’Èbre ;
2490Ils enlèvent les selles de leurs chevaux
Et leur ôtent les freins d’or ;
Puis ils les lancent dans les prés où il y a de l’herbe fraîche ;
Ils ne peuvent pour eux faire autre chose.
Ceux qui sont las s’endorment sur la terre.
2495Cette nuit-là on ne fit pas le guet.Aoi.

CCXIII

L’Empereur s’est couché dans un pré ;
Il a mis sa grande lance à son chevet, le baron ;
Car il ne veut pas se désarmer cette nuit.
Il a vêtu son blanc haubert, bordé d’orfroi ;
2500Il a lacé son beaume gemmé d’or ;
Il a ceint Joyeuse, cette épée qui n’eut jamais sa pareille,

firme cette tradition : « Haila (Galienne), ayant entendu Mainet se plaindre, lui donna, le cheval de son père avec, une épée qui ne le cédait qu’à Durendal, laquelle tomba plus tard au pouvoir de Charlemagne à Valsomorian.» (Cf. le vers 2318 du Roland. V. Mila y Fontanals : De la Poesia heroïco popular castellana, pp. 232 et 338, 339.) = 5° Le récit primitif du Voyage à Jérusalem, qui nous a été conservé dans la Karlamagnus Saga (XIIIe siècle), confirme la version du Roland au sujet des reliques qui étaient placées dans le pommeau de Joyeuse. Le grand Empereur y mit alors le fer de la lance qui avait été au nombre des instruments de la Passion. Même il n’aurait donné, qu’à ce moment le nom de Joyeuse à la célèbre épée, et le témoignage du Roland s’accorde, encore ici, avec celui de la Karlamagnus Saga : Pur ceste honur e pur ceste bontet — Li nums Joiuse l’espée fut dunez. (Vers 2506-2508 = 6° L’épée Joyeuse avait mille vertus. Elle jetait une clarté incomparable, préservait de l’empoisonnement son heureux possesseur, etc. etc. = 7° C’est une épée du même nom que les cycliques de la geste de Garin mettent aux mains de Guillaume, après la mort de Charlemagne. Mais peut-être convient-il de voir là une seconde joyeuse ; et la véritable épée du grand Empereur est, sans doute celle qu’on lui a placée au poing dans son tombeau, et dont il menace encore les païens.