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Et, à pleine lance, l’abat mort des arçons :
" Misérables, " s’écrie-t-il, " vous y mourrez tous les uns après les autres.
1535" Frappez, païens, nous les vaincrons. "
Et les Français : " Dieu, " s’écrient-ils, " quel baron nous venons de perdre ! »Aoi.

CXXXIV

Quand le comte Roland vit Samson mort,
Vous pouvez bien penser qu’il ressentit une grande douleur.
Il éperonne son cheval et, de toute sa force, prend son élan.
1540Dans son poing est Durendal, qui vaut plus que l’or fin ;
Le baron va donner à Valdabrun le plus rude coup qu’il peut
Sur le beaume chargé de pierreries et d’or.
Il lui tranche la tête, le haubert, le corps,
La selle incrustée d’or et de pierres précieuses,
1545Et jusqu’au dos du cheval, très profondément.
Bref (qu’on le blâme ou qu’on le loue), il les tue tous les deux.
" Quel coup terrible pour nous ! » s’écrient les païens.
" — Non, " s’écrie RolanI, « je ne saurais aimer les vôtres ;
« C’est de votre côté qu’est l’orgueil, et non le droit. »Aoi.

CXXXV

1550Il y a là un Africain venu d’Afrique :
C’est Malquidant, le fils au roi Malquid.
Ses armes sont toutes d’or battu
Et, plus que tous les autres, il flamboie au soleil.
Il monte un cheval qu’il appelle Saut-Perdu ;
1555Pas de bête qui puisse vaincre Saut-Perdu à là course.
Malquidant l’éperonne des éperons aigus
Et va frapper Anséis au milieu de l’écu,
Dont il efface le vermeil et l’azur ;
Puis il met en pièces les pans du haubert
Et lui plonge au corps le fer et le bois’ de sa lance.
1560Anséis meurt ; il a fini son temps,
Et les Français : " Baron, " disent-ils, " quel malheur ! "Aoi.